De nombreux commerçants décident d’ouvrir leur boutique en ligne, en complément ou en remplacement d’une ou plusieurs boutiques en dur. L’avantage est une économie conséquente : pas d’achat de fonds de commerce ou d’entrée dans un local ; pas de versement d’un loyer mensuel. Si cette stratégie commerciale a des aspects intéressants, elle nécessite tout de même des investissements et une compréhension du Web et du référencement.
Ouvrir une boutique en ligne : toute la réglementation
Réglementation liée au Web et RGPD
La protection des données personnelles sur le Web a été renforcée avec le RGPD : Règlement Général sur la Protection des Données. Depuis la publication de cette loi en France, tous les professionnels du Web qui récolent des données nominatives via leur site Internet sont obligés de :
- constituer leurs fichiers de clients ou de contacts sur des supports aisément exploitables : transférables, modifiables et destructibles sur simple demande du consommateur (principe de portabilité des données).
- Informer chaque visiteur de l’utilisation d’un cookie avec explication détaillée de la finalité de la démarche (pour revendre les données, créer un fichier prospect …).
- Avant toute navigation, donner la possibilité au visiteur d’accepter ou non le cookie via un choix express (pas de case pré-cochée) et nettement visible sur le site
- Ajouter la mention : « Conformément à la loi “informatique et libertés” du 6 janvier 1978, modifiée en 2004, vous bénéficiez d’un droit d’accès et de rectification aux informations qui vous concernent, que vous pouvez exercer en vous adressant à “indiquer le nom et les coordonnées du responsable à contacter”. Vous pouvez également, pour des motifs légitimes, vous opposer au traitement des données qui vous concernent ».
- Structurer leur site et leurs bases de données de manière à protéger les données nominatives : cryptage, renouvellement des mots de passe, mise en place d’étapes successives pour accéder aux données …
- Prévenir la CNIL sous 48 heures en cas de cyberattaque.
Réglementation liée aux pratiques commerciales
Vous devez respecter les règles du commerce : ne pas vendre à perte, afficher les prix de manière claire et concise avec les montants TTC et la TVA, ne pas faire de publicité mensongère, transférer une facture pour tout achat.
Règles de livraison des colis
Si vous ouvrez une boutique en ligne, vous serez confrontés à la livraison des colis, avec des risques de retard dans les délais annoncés ou encore avec des renvois de produits qui ne plairaient pas à la clientèle ou qui se seraient dégradés pendant le transport. Voici les règles à suivre.
Délai de livraison et information auprès du consommateur
Vous devez communiquer un délai ou une date de livraison AVANT acceptation de l’achat. Des mentions imprécises telles que « selon approvisionnement » ou « à titre indicatif » sont considérées comme abusives par la direction générale de la répression des fraudes.
Un produit endommagé à la livraison
Si le client n’a pas signé le bon de livraison, car le produit est endommagé ou parce qu’il ne correspond pas à la commande, vous êtes tenu de lui rembourser les frais de retour de lui renvoyer un nouveau produit gratuitement.
Vous pouvez vous retourner contre le transporteur pour obtenir dédommagement.
Le droit de rétractation de l’acheteur
Tout consommateur qui achète à distance (sur Internet ou par téléphone) dispose d’un droit de rétractation de 14 jours à compter :
- du jour de la livraison pour un produit
- du jour de l’achat pour un service
Pour permettre à vos clients d’actionner leur droit de rétractation, vous devez fournir un formulaire type de rétractation dans le colis. Si le client vous retourne ce formulaire accompagné du produit dans le délai imparti, vous êtes tenu de rembourser votre client. Le renvoi du colis reste à sa charge. Le remboursement doit intervenir sous 14 jours suivant la date à laquelle vous avez été informé de la rétractation. Il prend la même forme que le paiement (sauf accord avec l’acheteur). Si vous tardez à procéder au remboursement, le client est en droit de vous demander des intérêts de retard :
- au taux d’intérêt légal si le remboursement intervient dans les 10 jours qui suivent l’expiration du délai
- de 5% pour un retard entre 11 et 20 jours suivant l’expiration du délai de remboursement
- de 10% pour un retard entre 21 et 30 jours
- de 20% pour un retard entre 31 et 60 jours
- de 50% pour un retard entre 61 et 90 jours
- de 5 points supplémentaires par mois de retard supplémentaire jusqu’au prix initial puis à nouveau au taux d’intérêt légal
En cas de litige
En cas de litige, vous pouvez vous tourner vers la Direction Départementale de la Protection des Populations ou vers un médiateur de la consommation.
Comment monter une boutique en ligne : les étapes concrètes
Trouver un concept avec des produits à vendre
Le tout est de trouver le bon produit à proposer sur Internet, qui attire une clientèle sur la Toile. Au vu du nombre d’acteurs présents sur le Web dans tous les domaines, vous devrez soigner votre site et annoncer un positionnement clair et différenciant des concurrents leaders, voire vous spécialiser pour cibler une clientèle de niche.
Dès lors que vous portez un projet concret de e-commerce, vous pourrez commencer l’étude de marché : analyse de la concurrence et de la cible de clientèle sur Internet.
- Vous identifiez les concurrents leaders, leur stratégie digitale, le concept de leur site, les produits qu’ils mettent en avant et les facteurs clés de réussite.
- Vous sondez vos futurs clients pour connaître leur budget, leur panier moyen, leurs attentes, leurs freins à l’achat et les éléments qui déclenchent l’acte d’achat.
Monter une stratégie
Une fois le marché connu et compris, vous montez votre stratégie pour vous faire une place, en cohérence avec les conclusions tirées de l’étude :
- votre concept avec votre positionnement
- votre catalogue produits
- votre grille de prix
- votre image de marque : logo, charte graphique, message et valeurs de marque
- votre stratégie digitale : mots-clés sur lesquels vous référencer, leviers de communication utilisés, stratégie éditoriale globale (choix des réseaux sociaux, blogging et contenus diffusés …), choix d’aller vers une communication papier ou non (stratégie Web & Print) …
- votre site Internet : sa structure, son ergonomie
- le choix de vendre par d’autres canaux complémentaires ou non (vente à des distributeurs, sur des marchés spécifiques …)
A propos du site Internet
Votre site est votre principal outil de vente, c’est pourquoi vous devez le rendre attractif :
- un site e-commerce qui se charge très rapidement (1 à 2 secondes)
- la facilité de navigation
- la facilité de trouver ce que l’on cherche dans les rubriques
- la facilité d’acheter (réduire le nombre d’étapes pour accéder à l’achat)
- un site responsive, c’est-à-dire adapté au Smartphone
Budgéter la stratégie dans le plan de financement
Vous évaluez le coût du projet dans un tableau comptable appelé « plan de financement ». Il se présente comme suit :
Total des ressources | Total des besoins | ||
Création du e-commerce | 15 000 € | Apport personnel | 15 000 € |
Stock de départ | 2 000 € | Prêt d’honneur | 7 000 € |
Marketing et contenu éditorial | 5 000 € | Banque | 19 600 € |
Référencement payant | 7 000 € | ||
Immatriculation de l’entreprise | 1 500 € | ||
TVA | 6 100 € | ||
Trésorerie au démarrage | 5 000 € | ||
TOTAL | 41 600 € | TOTAL | 41 600 € |
La TVA sur les besoins est calculée dans une ligne séparée, car elle sera récupérée plus tard, en déduction de la TVA collectée (sauf si vous créez sous le régime auto-entrepreneur).
La trésorerie au démarrage permet de faire face aux premières semaines / premiers mois d’activité sans encaisser de chiffre d’affaires.
Le prêt d’honneur est un prêt que vous pouvez solliciter auprès d’une plateforme d’initiative locale (via France Initiative) pour augmenter votre capacité d’apport financier et obtenir un crédit bancaire. Un prêt d’honneur vient toujours en complément de la banque. Il est attribué à titre personnel et il est à taux 0.
Evaluer la rentabilité du e-commerce dans le compte de résultat
Pour anticiper vos finances et valider la rentabilité du projet, vous réalisez des prévisions dans un tableau appelé « le compte de résultat prévisionnel ». Ce tableau vous permet de connaître le chiffre d’affaires minimum à encaisser pour devenir rentable. Ramené au panier moyen de votre cible (vu dans l’étude de marché), vous connaissez le nombre de clients à gagner et fidéliser pour être rentable. Vous modélisez la fiscalité, les charges sociales … Le compte de résultat est réalisé pour les 3 premiers exercices. Il est hors taxes, car la TVA sera récupérée en déduction de la TVA collectée (sauf régime auto-entrepreneur).
Par exemple :
COMPTE DE RESULTAT PREVISIONNEL 1er exercice | |
Vente de produits | 75 000 € |
Frais de livraison versés par les clients | 17 500 € |
TOTAL CHIFFRE D’AFFAIRES | 92 500 € |
Achat de marchandises | 25 500 € |
Frais de livraison | 17 500 € |
Maintenance et gestion du site Internet | 3 000 € |
Référencement et stratégie digitale | 6 000 € |
Honoraires expert-comptable | 3 000 € |
Rémunération gérant | 18 000 € |
Cotisations sociales gérant forfait 1er exercice | 7 500 € |
Intérêts d’emprunt | 85 € |
RESULTAT | 11 915 € |
Impôt sur les sociétés | 1 787 € |
Résultat net | 10 128 € |
Remboursement capital de l’emprunt | 1 630 € |
Capacité d’autofinancement nette | 8 498 € |
Affiner la saisonnalité et les objectifs dans le compte de trésorerie
Le tableau suivant permet de scinder les chiffres du compte de résultat (annuel) dans un compte de trésorerie (mensuel). Cet angle financier affine les objectifs de chiffre d’affaires au mois le mois tout en réalisant l’influence de la saisonnalité. Ce tableau permet aussi de connaître le besoin en fonds de roulement et le nombre de mois d’avance dont vous disposez grâce à la trésorerie au démarrage.
Données Toutes Taxes Comprises (TTC) | janvier | février | mars | avril | mai |
Chiffre d’affaires (vente et livraison) | 3 000 € | 3 500 € | 4 000 € | 5 000 € | 9 000 € |
Renouvellement des marchandises | 0 | 2 000 € | 3 000 € | 0 | 4 000 € |
Frais de livraison | 700 € | 813 € | 930 € | 1 165 € | 1 400 € |
Maintenance du site | 300 € | 300 € | 300 € | 300 € | 300 € |
Stratégie digitale | 600 € | 600 € | 600 € | 600 € | 600 € |
Honoraires expert-comptable | 300 € | 300 € | 300 € | 300 € | € |
Remboursement des intérêts | 0 | 0 | 21 € | 0 | 0 |
Remboursement du capital de l’emprunt | 135 € | 135 € | 135 € | 135 € | 135 € |
Rémunération du gérant | 0 | 0 | € | 1 500 € | 1 600 € |
Cotisations sociales forfait | 0 | 0 | 1 875€ | 0 | 0 |
Résultat | 965€ | -648 € | -3161 € | 1 000 € | 965 € |
Trésorerie (démarrage 5 000 €) | 5 965 € | 5 317 € | 2 156 € | 3 156 € | 4 121 € |
Ici, les frais de livraison sont compris dans le prix de vente. Ils « s’annulent » entre les sommes versées par le client (inclus dans le chiffre d’affaires) et les sommes déboursées pour envoyer les colis (frais de livraison).
Le statut juridique pour un e-commerce
Vous pouvez créer l’entreprise sous le statut juridique :
- de société : EURL/SARL, SASU/SAS
- d’entreprise individuelle : régime de l’auto-entreprise, régime des frais réels
De nombreux créateurs d’entreprise choisissent le régime auto-entrepreneur pour la facilité d’immatriculation et de suivi administratif. Mais si l’auto-entreprise a des avantages, elle n’est pas adaptée à tous les modèles économiques. Il faut savoir que ce régime ne permet pas de séparer les patrimoines personnel et professionnel du gérant avec tout le risque financier que cela incombe, notamment en cas de crédit bancaire et de délai de paiement fournisseurs. De plus, l’auto-entreprise ne permet pas de déduire ses charges pour le paiement de l’impôt (calcul de l’impôt sur la base d’un revenu forfaitaire ; pour un commerçant, le chiffre d’affaires diminué d’un abattement de 71%). Enfin, l’auto-entreprise ne permet de pas de récupérer la TVA sur les premiers milliers d’euros. Il est donc essentiel de faire des simulations financières et fiscales pour choisir le statut juridique adapté à votre modèle économique. De plus, le régime social diffère selon le statut (base de calcul, taux et protection pour soi et ses ayant droits).
L’importance du business plan pour un projet entrepreneurial
Quel que soit votre projet de création d’entreprise, il est important de formaliser chaque étape de réflexion dans un seul et même document : le business plan. L’exercice permet de consigner toutes les informations que vous récoltez, de faire le point et de prendre vos décisions éclairées. Le business plan est une sorte de journal de bord. Si vous sollicitez un prêt bancaire, vous serez obligé de transmettre un business plan : il s’agit de l’outil de dialogue principal avec les financeurs.
Les formalités d’immatriculation d’une boutique en ligne
Vous immatriculez votre activité au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS) en vous rendant au centre de formalités des entreprises de la chambre de commerce et d’industrie. Si vous créez une société, vous devrez réaliser quelques formalités amont complémentaires :
- rédiger et signer vos statuts constitutifs
- déposer le capital social de la société sur un compte
- publier la naissance de la société dans un journal d’annonces légales
- débloquer le capital social en transmettant le Kbis
Le Kbis (document officiel attestant de l’existence de votre entreprise) est obtenu par courrier sous 30 jours suivant le dépôt du dossier à la chambre de commerce et d’industrie.